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Et les lauréats sont ... Marin Cornec et Matthis Auger

Le 27 octobre, lors des Doctoriales des l'océan, la Fondation de la mer et l'Institut de l'océan ont remis le prix de la première publication de thèse à ces deux doctorants de Sorbonne Université.

La publication de Marin Cornec

Marin Cornec a réalisé sa thèse à Sorbonne Université - Laboratoire d’Océanographie de Villefranche-sur-mer, sous la direction de Hervé Claustre et Sabrina Speich (ENS Paris). Son thème de recherche était  la dynamique des maximums profonds de biomasse phytoplanctonique, une approche par les flotteurs BioGéoChimique-Argo dans l’océan global. 

Deep Chlorophyll Maxima in the global ocean: occurrences, drivers and characteristics.

Cornec, M., Claustre, H., Mignot, A., Guidi, L., Lacour, L., Poteau, A., D’Ortenzio, F., Gentili, B., Schmechtig, C., (2021). Global Biogeochemical Cycles. https://doi.org/10.1029/2020GB006759

Présent dans tous les milieux aquatiques, le phytoplancton est un acteur essentiel des écosystèmes océaniques : il représente la base du réseau trophique océanique et joue un rôle fondamental dans le transfert et la séquestration du carbone depuis l’atmosphère vers les couches profondes de l’océan. Aujourd’hui, notamment grâce aux observations satellite depuis l’espace, la détection et la quantification du phytoplancton à la surface de l’océan global sont relativement bien établies. Cependant, ces observations sont limitées à une couche superficielle de la colonne d’eau, rendant ainsi la connaissance des dynamiques de sub-surface encore lacunaire. Plusieurs mesures in situ ont néanmoins montré la présence de « nuages » de phytoplancton actif dans des zones « profondes » de l’océan : les maxima profonds de chlorophylle (DCM, pour Deep Chlorophyll Maximum), photo-pigment ubiquiste des cellules végétales. Les DCMs constituent un compartiment phytoplanctonique encore peu connu : sont-ils des phénomènes récurrents dans l’océan global ? Constituent-ils une contribution significative du stock de phytoplancton ? Quels facteurs environnementaux favorisent leur apparition ?

Cette étude utilise les données de plus de 500 flotteurs profileurs Biogéochimiques Argo (BGC-Argo), des robots océanographiques autonomes capables d’effectuer des mesures in situ de paramètres physiques, biologiques, et chimiques à haute résolution spatiale et temporelle, entre la surface des océans et jusqu’à 2 kilomètres de profondeur. Elle présente une première cartographie de l’occurrence saisonnière des DCMs dans l’océan mondial, ainsi qu’une description de leurs profondeur et intensité : les DCMs sont des phénomènes éphémères et apparaissant exclusivement autour du solstice estival dans les latitudes polaires, tandis qu’ils constituent une caractéristique permanente des régions subéquatoriales et subtropicales. Après une classification des provinces océaniques selon leur similarité vis-à-vis des caractéristiques des DCMs, les paramètres environnementaux responsables des variabilités interrégionales sont ensuite étudiés : la disponibilité combinée de la lumière et des nutriments en profondeur détermine la caractérisation du développement phytoplanctonique en profondeur. Ainsi, les DCMs des régions subtropicales atteignent des profondeurs maximales où l’éclairement est faible et entraine la prépondérance de processus d’adaptation pour la survie cellulaire. A l’inverse, aux latitudes subéquatoriales, des conditions environnementales favorable en profondeur induisent l’accumulation effective de cellules phytoplanctoniques au DCM. 

Les observations établies dans cette étude pourront servir par la suite à mieux estimer et contraindre les flux de carbone, dresser des bilans de production phytoplanctonique globaux et régionaux, alimenter des modèles biogéochimiques (e.g. modèles de prédiction climatiques, modèles halieutiques), et ainsi soutenir des études sur des thématiques environnementales et sociales d’actualité.

 

 

La publication de Matthis Auger

Je suis en troisième année de thèse au LOCEAN, sous la direction de Jean-Baptiste Sallée. Je travaille sur la dynamique et les mécanismes de transport de chaleur de l’océan Austral, leurs différentes échelles ainsi que leurs changements à long terme. Dans le cadre de cette thèse, j’ai étudié les tendances de température en profondeur dans l’océan Austral à partir de mesures in situ. J’ai également développé un jeu de données de hauteur de mer sous la banquise à partir de mesures satellites. Ces données ont permis de mieux caractériser la dynamique grande échelle et tourbillonnaire de l’océan Austral sous la banquise, et de comprendre leur rôle dans le transport de chaleur dans l’océan subpolaire.

L’océan Austral qui encercle le continent Antarctique est au cœur de la circulation océanique mondiale. Il lie entre eux tous les océans, de sorte que des changements qui surviendraient dans ses propriétés physiques ou chimiques, impacteraient le reste du globe. Pourtant, en raison des conditions climatiques qui y prévalent et de son éloignement, très peu de données existent pour comprendre comment fonctionne et évolue cet océan.

Dans cette publication nous utilisons 25 ans de mesures de température de la surface jusqu’à 800 mètres de profondeur entre Hobart et la base française de Dumont d’Urville en Antarctique. Elles ont été recueillies à bord du brise-glace Astrolabe lors de ses missions de ravitaillement de la base française. Elles ont été acquises par l’IPEV (Institut Paul Emile Victor) et le LEGOS (Laboratoire d’Etudes en Géophysique et Océanographie Spatiale).

Grâce à ces mesures, nous avons pu mesurer précisément le changement de température des eaux Antarctiques en surface et en profondeur. Si les réchauffements les plus importants se trouvent dans le nord de la région observée, loin de la calotte polaire, l’étude révèle un second réchauffement, en profondeur, près du continent Antarctique. Peut-être plus marquant encore, ces eaux qui se réchauffent près du pôle, ont remonté vers la surface au cours des 25 dernières années.

Si ces eaux finissaient par atteindre la surface dans cette région de l’Antarctique, la perte de masse de la calotte glaciaire se trouverait accélérée, avec des conséquences importantes sur la circulation océanique, le niveau de la mer, et donc sur le climat et les sociétés humaines